Maîtrise foncière : qui fait quoi

Pour acquérir les terrains sur lesquels les différents chantiers se déroulent, plusieurs acteurs se sont partagé le travail. A chacun selon ses compétences…

Redonner à la Saâne un espace d’expansion en cas de crues… La connecter à la mer… Relocaliser le camping municipal de Quiberville et les bungalows de Sainte-Marguerite-sur-mer… Construire une station d’épuration à Longueil… Restaurer la biodiversité

Tous ces chantiers qui, mis bout à bout, constituent l’ossature du projet de territoire Basse Saâne 2050, nécessitent que les maîtres d’ouvrage s’assurent la propriété des terrains concernés. Faire débouler des pelleteuses sur un terrain qui ne vous appartient pas, c’est très mal élevé !

La « maîtrise foncière » est donc au cœur du projet territorial. Elle est assurée par plusieurs acteurs, qui ont chacun leurs règles, leurs méthodes, et leurs compétences : le Conservatoire du littoral, l’Établissement public foncier de Normandie (EPFN), la Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER). Et, bien sûr, les communes concernées et la Communauté de communes Terroir de Caux.

• La Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) de Normandie
C’est une société anonyme, sans but lucratif (elle ne distribue pas de bénéfices), avec des missions d’intérêt général, placée sous la tutelle des ministères de l’Agriculture et des Finances. Elle intervient sur l’ensemble du marché foncier rural. Elle acquiert des biens agricoles et ruraux pour les attribuer à des candidats, privés ou publics, dont les projets concourent à la mise en œuvre de politiques d’aménagement durable des territoires. C’est donc la SAFER qui est à la manœuvre pour acquérir, dans le cadre du projet Basse Saâne 2050, les différents terrains agricoles nécessaires au déploiement du projet. Dans certains cas, ces terrains seront ensuite rétrocédés au Conservatoire du littoral, et deviendront de ce fait des propriétés inaliénables du Conservatoire du littoral, qui pourra y restaurer une gestion agricole. Vous suivez ?

• L’Établissement public foncier de Normandie (EPFN)
Son métier, c’est d’acquérir des terrains, en vue de leur aménagement, par un tiers chargé de la construction de logements, de nouveaux quartiers ou encore d’équipements publics… Cette acquisition stratégique s’appelle le portage de terrains. Pour un temps donné, l’EPF possède et gère (sécurité, gardiennage, etc.) ce foncier. Éventuellement, il peut commencer à le préaménager (démolir des bâtiments existants, dépolluer etc.) avant de le vendre à une collectivité. Dans le cas du nouvel équipement touristique, le propriétaire du terrain est au final la commune de Quiberville. Mais le savoir-faire de l’EPFN aura été précieux pour optimiser ce terrain, regrouper les parcelles, conseiller la commune dans sa stratégie foncière, accompagner la déconstruction et la renaturation de l’actuel camping….

• Le Conservatoire du littoral
Il coordonne le projet Basse Saâne 2050, et il intervient dans la vallée depuis 2006. Sa mission : acquérir des terrains dans les zones littorales pour les soustraire à la spéculation foncière et à l’artificialisation. Une fois acquis, ces terrains deviennent une propriété publique « inaliénable » : le Conservatoire du littoral ne peut les revendre, il doit en confier la gestion, le plus souvent à la commune ou au département : ici, c’est le Conseil Départemental de la Seine-Maritime, au titre des espaces naturels sensibles. Le Conservatoire a acquis des terrains dans la basse vallée, comme il le fait dans d’autres vallées côtières de Normandie. En 2018, il a étendu son périmètre d’intervention aux côteaux de la Saâne, avec la validation des conseils municipaux. Mais le Conservatoire du littoral ne peut pas, par ses statuts, acquérir des terrains pour y construire, par exemple, un nouvel équipement touristique (puisqu’il doit protéger les sites qu’il acquiert contre l’artificialisation). C’est donc, dans ce cas, l’Établissement public foncier qui intervient.

• La Communauté de communes Terroir de Caux
C’est elle qui a acquis la parcelle sur laquelle a pu être construite la station d’épuration de Longueil.

Tous ces acteurs interviennent différemment. Mais ils sont tous confrontés à une règle intangible : ils ne peuvent acheter un terrain… que si le propriétaire accepte de le vendre ! Il peut donc s’écouler beaucoup de temps entre l’adoption d’un projet et sa réalisation. « Dans une négociation foncière, la patience est un gage de réussite, explique Elodie Agard, responsable de l’action foncière à la délégation Normandie du Conservatoire du littoral. Si un propriétaire ne veut pas vendre, on pourra lui donner tous les arguments imaginables, on n’arrivera à rien ». Bien sûr, la SAFER et le Conservatoire du littoral ont un atout dans leur manche : le droit de préemption. Pour un projet de vente, le notaire doit déclarer cette opération (une « déclaration d’intention d’aliéner ») et dans certaines conditions les opérateurs publics peuvent évincer l’acquéreur et acheter à sa place. Parfois, en renégociant le prix. Mais dans ce cas, le vendeur garde toujours la possibilité de ne plus vendre son bien !